315. De tous les phénomènes spirites, ceux qui prêtent le plus à la fraude sont les phénomènes physiques, par des motifs qu'il est utile de prendre en considération. D'abord, parce que s'adressant aux yeux plus qu'à l'intelligence, ce sont ceux que la prestidigitation peut le plus facilement imiter. Secondement que, piquant plus que les autres la curiosité, ils sont plus propres à attirer la foule et par conséquent plus productifs. A ce double point de vue, les charlatans ont donc tout intérêt à simuler ces sortes de manifestations ; les spectateurs, pour la plupart étrangers à la science, y vont généralement chercher une distraction bien plus qu'une instruction sérieuse, et l'on sait qu'on paye toujours mieux ce qui amuse que ce qui instruit. Mais, à part cela, il y a un autre motif non moins péremptoire. Si la prestidigitation peut imiter des effets matériels, pour lesquels il ne lui faut que de l'adresse, nous ne lui connaissons pas, jusqu'à présent, le don d'improvisation qui requiert une dose d'intelligence peu commune, ni celui de produire ces belles et sublimes dictées, souvent si pleines d'à-propos, que donnent les Esprits dans leurs communications. Ceci nous rappelle le fait suivant.
Un homme de lettres assez connu vint un jour nous voir et nous dit qu'il était très bon médium écrivain intuitif, et qu'il se mettait à la disposition de la société spirite. Comme nous avons pour habitude de n'admettre à la société que des médiums dont les facultés nous sont connues, nous le priâmes de vouloir bien venir auparavant faire ses preuves dans une réunion particulière. Il s'y rendit en effet ; plusieurs médiums expérimentés y donnèrent soit des dissertations, soit des réponses d'une remarquable précision sur des questions proposées et des sujets inconnus pour eux. Quand vint le tour de ce monsieur, il écrivit quelques mots insignifiants, dit qu'il était mal disposé ce jour-là, et depuis nous ne l'avons plus revu ; il a trouvé sans doute que le rôle de médium à effets intelligents était plus difficile à jouer qu'il ne l'avait cru.